Dauphins : une protection pour quelles menaces
En guise d’introduction, j’ai voulu répondre à une question récurente qui m’a été posée par des jeunes et des moins jeunes : Pourquoi protèger une espèce animale ? sans vouloir m’étaler sur le sujet je dirai principalement qu’il s’agit tout d’abord d’une question d’éthique. La terre appartient à toutes les espèces qui la partagent, et chacune d’entre-elles possède autant de droits que l’être humain. C’est aussi une question écologique. Chaque espèce joue un rôle dans les grands équilibres de la vie ; sa place est précise et non interchangeable. Lorsque une espèce disparaît prématurément (du fait de l’homme), les autres espèces qui lui sont liées (prédateurs, proies, parasites, etc.) n’ont pas le temps de s’adapter : ces adaptations ne se font pas à l’échelle humaine, mais à celle des temps géologiques ; c’est donc l’écosystème dans son ensemble qui est à son tour déséquilibré, voire menacé.
Partant du constat que les mammifères marins et plus particulièrement les grands dauphins sont de très bons indicateurs de l’état de « santé » de la mer, et que la spécificité de ces cétacés et leur présence au sommet de la chaîne alimentaire au même titre que l’Homme, font qu’ils sont le reflet de ce qui se passe dans la mer, les témoins de la modification des écosystèmes et de la dégradation de l'environnement.
Mais l’état de conservation de beaucoup de populations de dauphins dans le monde est menacé par les prises accidentelles, la destruction de l’habitat, la pêche excessive et le changement climatique. D’autres menaces comprennent des activités susceptibles d’effrayer, de chasser ou de nuire d’autre façon à ces espèces, comme la pollution sonore sous-marine provenant par exemple du trafic maritime, des campagnes de sondages sismiques et des sonars militaires.
Des centaines de milliers de dauphins meurent chaque année des suites de ces menaces.
Pêche et prises incidentes: la pêche industrielle augmente en intensité et en extension dans le monde entier. L’introduction de techniques de pêche plus durables pourrait réduire cette pression. Or, l’utilisation de méthodes de pêche destructrices et la croissance des nombreuses pêcheries commerciales modernes continuent à réduire les populations de dauphins à travers le monde. Ces menaces peuvent se traduire directement par des prises accidentelles et indirectement par la perte des espèces proies.
Chasse ciblée: certaines communautés chassent le dauphin depuis des siècles. Dans certains cas, les prises accidentelles ont été remplacées par la pose de filets ou la chasse au harpon délibérée par de petites pêcheries. Ces chasses ne sont probablement pas durables. La supposition que les dauphins sont en concurrence avec les pêcheries dans la quête du poisson ou bien qu’ils endommagent les filets, a incité à des massacres dans quelques régions.
Pollution chimique: les sources de pollution chimique sont très diverses : eaux usées des ménages, déversements industriels, filtrations de décharges, retombées atmosphériques, effluents domestiques et lessivage des terres cultivées, décharges opérationnelles de mines et appareils de forage, naufrages et déversements en mer.
Les impacts de la pollution chimique vont de l’empoisonnement physique direct à la dégradation d’habitats importants. Parmi les produits chimiques les plus dangereux pour les dauphins, on compte les polluants organiques persistants (le DDT par exemple) et les produits chimiques industriels. Ces substances entrent dans les chaînes alimentaires marines et s’accumulent aux différentes étapes de la chaîne avant d’atteindre les grands prédateurs marins. Cette pollution se traduit probablement par des troubles du système de reproduction et du système immunitaire des mammifères marins. On sait que de nombreuses populations de dauphins sont fortement contaminées, ce qui est un facteur de mortalité accrue.
Pollution et harcèlement sonores: l’ouïe est le sens le plus important des dauphins et leur est vital afin de trouver de la nourriture, s’orienter et d’inter-agir socialement. Toute perte de leur capacité auditive, due soit à un dommage physique, soit au masquage par d’autres sons, peut compromettre sérieusement la viabilité des individus et donc des populations. Le bruit causé par l’homme dans l’environnement marin accroît encore le niveau de son naturel biologique et ambiant déjà significatif. La pollution sonore provient notamment des navires, des activités militaires, des dispositifs anti-prédation de l’industrie de la pêche, la recherche océanographique et les canons à air utilisés dans les essais sismiques pour trouver des gisements de pétrole et de gaz. Les impacts potentiels du bruit d’origine anthropique sur les dauphins vont des dommages physiques aux changements de comportement, à l’augmentation du stress et à l’obligation d’abandonner des habitats importants.
Perte et dégradation des habitats: la perte de leur habitat est particulièrement dangereuse pour les dauphins dont l’aire de répartition est restreinte comme les dauphins de rivière. Dans beaucoup de zones, la perte d’habitat est causée par des barrages, les structures de la pêche et le prélèvement d’eau pour l’usage humain. Dans certaines parties du monde, la gestion de l’eau, la lutte contre les crues et la modification majeure de rivières, y compris le prélèvement des eaux de surface, a entraîné le déclin des populations. Les barrages empêchent la migration et créent des barrières qui fragmentent les populations.
Changement climatique: les conséquences du changement climatique pour les dauphins sont aggravées par l’apparente rapidité de ce réchauffement (3 à 4 degrés Celsius aux hautes latitudes au cours d’une période de 50 ans seulement), ce qui est beaucoup plus rapide que tout ce à quoi les dauphins ont été exposés dans le passé. La vitesse actuelle du changement est sans doute trop élevée pour de nombreuses espèces de dauphin qui n’y résisteront pas. Le réchauffement aquatique aura certainement un impact sur la disponibilité des espèces proies, ce qui pourrait alors contraindre les dauphins à trouver de nouvelles aires d’habitat et de reproduction. Le niveau de la mer s’élève et les modèles météorologiques en mutation avec des tempêtes plus fortes, s’ajoutent à la dégradation et à la perte de l’habitat.